Conseils de Pros : Quand le choix du papier fait partie du processus de création
Conseils de Pros : Quand le choix du papier fait partie du processus de création
Cela fait plus de 30 ans que le photographe d’origine allemande, Harald Gottschalk est client du laboratoire Picto. Trois décennies qu’il suit l’évolution technologique du tirage photographique. Harald est un photographe curieux, il est fasciné par la richesse des gammes de papier, il n’hésite pas à explorer les différents types de rendus qu’offrent les nombreux supports. Du “duratrans” à la toile de type “canvas” en passant par les papiers traditionnels, ce plasticien se sert de la technologie pour repousser les limites de la photographie.
Venu du sud de l’Allemagne, Harald Gottschalk s’installe à Paris au début des années 80. C’est en croisant le chemin de Robert Doisneau qu’il retrouve la passion de son enfance, la photographie. Il devient l’assistant de Keiichi Tahara et découvre de nouvelles facettes de la photographie; avec lui il développera sa pratique et aiguisera son regard. Aujourd’hui il mêle photographie commerciale et travaux fine art.
Rencontre.
Utilisateur du laboratoire Picto depuis plus de 30 ans, comment avez-vous perçu l’évolution des techniques et des supports de tirages ?
La technologie nous permet d’aller beaucoup plus loin qu'auparavant. Je me souviens lorsque j’ai commencé à faire tirer mes images par Picto - nous étions en 1987, c’était encore l’époque de Pierre Gassmann rue Delambre. Il y avait le noir et blanc très qualitatif, et aussi quelques beaux papiers pour la couleur mais l’offre n’était pas aussi étendue qu'aujourd'hui.
Au fil du temps et avec le numérique, nous avons vu arriver sur le marché toute une variété de papiers. En couleur, nous arrivions enfin à obtenir la saturation que nous ne pouvions pas avoir en argentique. On peut vraiment dire que le numérique a ouvert une nouvelle dimension au tirage et les papiers sont absolument fantastiques. Ce qui m’intéresse, c’est que l’on peut travailler sur les couleurs et les matières. J’aime les papiers épais, quand ils sont lisses, mais aussi ceux qui sont légèrement texturés. Il y a beaucoup de sensualité aujourd’hui dans le papier, chose qu’il n’y avait pas avant. Ce velouté du papier est magnifique mais l’inconvénient, c’est qu’il est fragile.
Tirages de test de papiers fine art avec la série des instruments de musique © Harald Gottschalk
Comment choisissez-vous vos supports de tirages ?
C’est de l’ordre de l’instinct. Sur certains sujets, c’est le support qui s’impose à moi. Je considère que pour un artiste photographe, le choix du papier fait partie du processus de création, même si ce n’est pas le processus final car l’encadrement peut également jouer un rôle important.
En fait, c’est une question que je me pose très tôt, sous quelle forme ai-je envie de réaliser une série ? Par exemple, pour mes séries sur les fruits et les instruments de musique, je voulais obtenir une résonance à la photographie publicitaire. L’idée d’utiliser le support transparent s’est très vite imposé pour pouvoir les rétro-éclairer. C’était dans un contexte artistique, je pouvais leur donner vie en plaçant les tirages dans des caissons lumineux, ou les poser simplement sur des fenêtres pour profiter de la lumière du jour… Le rendu est très lumineux.
Parfois, le choix du papier vient même avant la réalisation du sujet. J’ai découvert les papiers japonais Awagami il y a peu de temps. J’ai collaboré longtemps avec Keiichi Tahara, le Japon m’influence beaucoup dans mon travail. C’est un papier très fin, très délicat. J’ai vraiment envie de l’utiliser, donc aujourd'hui je cherche un travail à réaliser qui irait avec ce papier si particulier. Donc là, on est dans une démarche encore différente. Je sais que je vais l’utiliser mais je ne sais pas encore comment…
J’aime prendre mon temps. Par exemple, en ce moment, je réalise une nouvelle série, visible sur mon Instagram, sur les instruments de musique. Et je suis en pleine réflexion sur le bon papier à choisir. Je sais que je vais me diriger vers un papier très épais, mais je ne sais pas encore si je vais choisir un aspect mat ou satiné. Pour être sûr de son choix, il faut vraiment faire des essais, c’est en voyant et en touchant que l’on peut prendre la décision finale.
Installation d’une impression directe sur toile © Harald Gottschalk
Quels sont vos supports de prédilection ?
Au quotidien j’utilise le RC brillant, mais mes papiers de prédilection sont les papiers très épais qui ressemblent un peu aux traditionnels baryté. C’est le Museum Hahnemühle que j’affectionne plus particulièrement. C’est le plus épais avec ses 350 grammes. Mais je ne m’interdis rien, j’explore tout, pour moi, le choix du papier est vraiment au service de l’œuvre ! Par exemple avec l’impression directe sur toile de type “canvas”, le résultat est vraiment étonnant, ça donne vraiment un effet pictural. Je l’ai utilisé pour un travail personnel sur le feu d’artifice, mes images prennent vie comme si c’était de la peinture. Et puis c’est un support souple très solide, on peut l’enrouler, le dérouler, le tendre en châssis, le mettre en caisse américaine… les possibilités sont multiples ! Imaginez tout ce que l’on peut faire avec.
Dernièrement, j’ai testé l’impression directe sur alu brossé pour des photos de concert. Le résultat est tout simplement extraordinaire. Lorsque l’on fait des images de scène, on profite déjà de toute la scénographie du spectacle, mais quand on ajoute en plus cet alu brossé, il y a un effet de lumière supplémentaire. C’est comme si on avait ajouté de l’éclairage. Et le rendu diffère en fonction de l’inclinaison de l’œuvre, c’est magique !
Pour tous ces supports très spécifiques, qui ont du caractère, il faut vraiment avoir une démarche artistique et que ce soit justifié. On ne peut pas s’en servir “gratuitement”, cela n’aurait pas de sens.
Vue d’exposition Harald Gottschalk
Auriez-vous des conseils à donner aux photographes ?
Le seul conseil que je peux donner, c’est qu’avant d’utiliser la plateforme PictoOnline, il faut avoir un contact direct avec les papiers. Il est impératif de ressentir la matière au toucher, et se rendre compte de la tenue par le grammage… Et aussi, ça permet de découvrir de vraies merveilles. Vient ensuite la phase de test, avant de passer à la production. Les échantillons de papiers sont visibles au laboratoire, mais sont également en vente sur PictoOnline : https://www.pictoonline.fr/prestation/boutique/echantillon-de-papier.